TR - Sébastien Martiny passe le relais à la jeune génération

Sébastien Martiny, le doyen des équipes de France de gymnastique toutes disciplines confondues, a décidé de mettre un terme à sa longue et belle carrière de trampoliniste. Quadruple médaillé mondial et double médaillé européen en trampoline synchronisé, il avait aussi représenté la France lors des Jeux de Rio en 2016. Licencié à Bois-Colombes depuis 31 ans, il restera proche des trampolines puisqu’il va poursuivre son activité de conseiller technique sportif débutée depuis 2 ans auprès de la FFGym.

Pourquoi cette décision ?

C’était réfléchi et prévu depuis longtemps. J’avais prévu d’arrêter après ce cycle olympique, donc l’été dernier. Mais avec la Covid-19, j’ai quand même voulu aller au bout du cycle et effectuer cette année supplémentaire. Mon objectif, c’était de participer aux compétitions internationales, comme j’étais remplaçant lors des derniers championnats d’Europe et qu’il n’y a plus de compétitions internationales majeures avant les Jeux, j’ai décidé d’arrêter dès maintenant. J’ai eu une longue carrière et j’en suis très content. J’ai eu beaucoup de chance. Je finis en pleine forme.

Qu’est-ce que tu retiendras de ces années de trampoline et d’équipe de France ?

Je retendrai surtout de belles aventures, parfois avec de magnifiques exploits parfois avec des déceptions, mais ce sont toujours de beaux souvenirs. J’ai toujours vécu ça comme une aventure presque familiale parce que ça fait tellement longtemps que je suis là, je connais tout le monde au niveau national et international. C’est toujours un plaisir de retrouver les gens qui partagent la même passion. C’est une vie atypique mais géniale.

Quels sont les moments marquants de ta carrière ?

Il y a deux moments qui m’ont énormément marqué. Le premier, ce sont mes premiers championnats du monde par groupe d’âge, à 11 ans en 1996 au Canada. C’était mon premier voyage à l’autre bout du monde et mes premiers championnats du monde. J’ai tout découvert avec les yeux qui brillent. On était arrivés deux jours plutôt pour voir les seniors concourir et j’ai vu la France gagner par équipe. C’était un moment incroyable parce que mes idoles à l’époque étaient devenues champions du monde sous mes yeux. Et puis la compétition, s’est extrêmement bien passée pour moi : j’avais fini 4e en individuel et on gagne avec Grégoire [Pennes] en synchronisé. J’ai entendu ma première Marseillaise. Cette expérience m’a permis de prendre conscience, que je faisais déjà partie des meilleurs mondiaux de ma génération et de mon envie de poursuivre le trampoline à haut niveau. A l’époque Christine Blaise, était déjà mon entraîneur. J’ai commencé le trampoline à 5 ans et demi avec elle, elle m’a emmené aux JO à 31 ans et elle m’a encore accompagné ces derniers mois. J’ai toujours fait du trampoline avec elle sauf entre mes 19 et 27 ans quand je suis allé à Antibes pour rejoindre l’équipe de France senior qui s’entraînait exclusivement là-bas à l’époque. Franck Bardy et Guillaume Bourgeon m’ont permis de passer un palier supplémentaire et de gagner mes premières médailles internationales chez les seniors. Et notamment ma seconde médaille d’argent mondiale avec Grégoire en synchronisé chez les seniors en 2010. C’est mon second moment le plus marquant, parce qu’on avait déjà remporté l’argent l’année précédente et donc ont été attendu surtout que cette année-là les championnats du monde avaient lieu en France, à Metz. La salle était pleine grâce à une très belle communication de l’organisation, certaines personnes n’ont pas pu renter, c’était fou. Pour les finales, les gens étaient venus principalement pour nous encourager, ça criait. C’est la seule fois de ma vie où j’ai entendu crier avant même qu’on monte sur le trampoline. On a fait un bon mouvement et on est resté premiers longtemps. Seuls les Chinois ont fait mieux et sont passés devant nous au dernier moment. C’est un souvenir magique que de gagner une médaille mondiale à domicile. J’ai plein d’autres moments marquants, mais ces deux-là sont vraiment particuliers.

Je me souviens aussi d’un sentiment de bonheur et de fierté lorsque je suis à nouveau monté sur un podium mondial en 2015 avec Allan Morante en synchronisé. On avait réussi à reconstruire l’une des meilleures paires mondiales, alors que les années précédentes avaient été compliquées suite à l’arrêt de mon précédent partenaire, Grégoire, avec qui je m’entraînais depuis mes débuts.

Évidemment, ma participation aux Jeux de Rio est un moment très marquant également parce que j’étais remplaçant en 2008 et 2012, et donc quand j’ai enfin réussi à me qualifier en 2016, à 31 ans, c’était une grande joie. En plus, j’avais le recul nécessaire pour me rendre compte de la chance et du parcours réalisé pour arriver jusqu’ici donc j‘ai pu profiter pleinement de cette compétition. J’ai battu mon record personnel sur le 1er passage et presque sur le 2e. Je termine 10e pas loin de la finale parce que la concurrence était meilleure, mais je suis fier de ce que j’ai produit. C’était magique. Cette année, je vais reprendre mes habitudes de spectateur et suivre les Jeux depuis Paris, car en tant que passionné de sport, c’est un événement à ne pas manquer.

Tu es conseiller technique sportif (CTS) à la FFGym depuis 2 ans, comment as-tu fait ce choix professionnel et quels sont tes missions ?

J’ai un diplôme d’ingénieur informatique. Après la déception de ne pas participer aux Jeux de Londres, j’ai décidé de faire un tour du monde des centres d’entraînement, tout seul, pendant 8 mois, grâce à mes contacts à l’international. Je suis parti aux USA, au Canada, en Australie, au Mexique, au Japon et en Chine. J’avais fait le choix de suivre leur programme et de m’adapter. Avec le recul, je pense que ça m’a permis de gagner en régularité et de produire le meilleur au moment où ça comptait. C’était très enrichissant. Ça m’a remotivé et relancé ma carrière sportive. En rentrant, je me suis dit que je voulais partager mon expérience en travaillant dans le monde du trampoline. J’ai commencé à passer mes diplômes, le DEJEPS puis le professorat de sport. J’ai d'abord été à la du 95 et maintenant que je suis rattaché à la FFGym depuis 2 ans. Mes missions étaient adaptées à mon temps d’entraînement. J’intervenais dans la formation des DE et des moniteurs, ainsi que dans l’accompagnement des jeune trampolinistes d‘ile de France dans l’idée est de construire un collectif régional. Ces missions s’arrêtent cet été. Maintenant que je suis disponible à plein temps, je suis en discussion avec la direction technique nationale au sujet de mes prochaines missions, en fonction de leur besoin et de mes envies. J’ai une vision systémique de la performance. J’ai l’envie d’entraîner à haut-niveau, mais pour ça, il faut aussi former de bons entraîneurs et développer la discipline, donc je reste ouvert à toute proposition. Mon but est de travailler en collaboration avec tout le monde pour améliorer ces 3 facteurs.

Que peut-on peut te souhaiter ?

Personnellement, on peut me souhaiter d’avoir une vie famille comblée, avec ma femme Joëlle, une ancienne de l’équipe de France et médaillée internationale en trampoline qui entraîne aujourd’hui en club et nos deux enfants. Professionnellement, on peut me souhaiter réaliser de nouveaux défis en prolongeant ma passion pour le trampoline en jouant un autre rôle que celui d’athlète, en développant la discipline, en aidant les jeunes à progresser et à être heureux dans leur pratique pour qu’ils puissent vivre la même vie que la mienne.